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Le Petit chien blanc, par Michelle Mauge (4eD)

    Comme tous les jours, Mathieu partait travailler à 7h00 et Clémence nettoyait la maison pour passer le temps. A midi, elle alla chercher le courrier. Elle était très pressée et descendait les escaliers comme une fusée pour avoir les résultats de son 29ème entretien d’embauche dans le domaine de l’informatique. Elle prit le courrier et n’attendit pas de remonter pour l’ouvrir. C’était encore un refus ! Déçue, elle rentrait donc chez elle en prenant les escaliers ; ce n’était pas très long ni trop fatiguant car elle habitait au premier étage.
    Elle commençait à faire à manger quand elle vit de nouveau ce petit chien blanc. Cela faisait plusieurs jours qu’il trainait devant sa grande fenêtre. Mais cette fois, elle ne put l’observer plus longtemps car la fourrière vint le prendre. C’était tout à fait normal étant donné qu’il n’avait pas de collier mais en même temps, c’était plutôt triste à voir. Elle reconnut le camion de la fourrière et sut de quelle fourrière il s’agissait. Malheureusement, son fiancé Mathieu avait horreur des chiens, il en était presque allergique ! Elle ne pouvait donc pas envisager de l’adopter.
    Ce petit chien hantait ces rêves, et plus les jours passaient, plus elle s’accrochait à ce chien. Il avait une tête très mignonne et vraiment très attirante, il avait l’air d’un parfait innocent parmi les coupables. Clémence avait décidé de ne rien dire à Mathieu à propos de ce petit chien et de ses rêves. Elle ne pouvait plus manger ni boire. Il lui fallait à tout prix revoir ce petit chien.
    Le lendemain matin, Mathieu partit travailler et Clémence attendit qu’il soit loin avant de sortir à son tour. Elle avait l’intention d’aller à la fourrière et d’adopter ce petit chien blanc à l’insu de Mathieu. Au bout de dix minutes, elle arriva à la fourrière. A l’accueil, il y avait une très jeune et gentille demoiselle qui la conduisit vers les cages des animaux. Il devait y avoir une trentaine de cage, chacune ne pouvant contenir que trois ou quatre animaux. Mais ces cages étaient toutes remplies avec au moins cinq animaux tandis que le petit chien blanc était tout seul dans la plus grande cage. Clémence demanda donc à la jeune demoiselle si elle pouvait adopter ce petit chien blanc lorsqu’une vieille dame aux cheveux gris, au nez crochus et au visage plein de verrues, l’interpela : « Ce chien est le démon incarné, il ne vous apportera que du malheur et que de la souffrance, méfiez-vous ! Je vous le dis ! ». Sur ces mots, Clémence répondit : « Ecoutez madame, je ne suis pas superstitieuse et je ne vous ai rien demandé. Alors laissez-nous tranquille ! ». La vieille dame repartit avec un air sournois et Clémence adopta tout de même le petit chien blanc.
    Elle le ramena chez elle, mais étrangement, tous les chiens qu’elle croisa, grognèrent et montrèrent leurs dents en le regardant. Selon elle, son nouveau compagnon devait être, en quelque sorte, le maître de la rue. Une fois chez elle, Clémence prit soin de le cacher en attendant le retour de Mathieu.
    A son arrivée, Clémence lui annonça la nouvelle. Il le prit très mal. Il ne comprit pas son geste. Alors le jeune couple s’engagea dans une grosse et longue dispute. Au bout d’un quart d’heure, le petit chien, qui n’avait toujours pas de nom, sortit de sa cachette et se dirigea vers le couple colérique. A sa vue, Mathieu se calma immédiatement et fut irrésistiblement attiré par lui. Il pardonna tout à sa fiancée et en vint même à la féliciter.
    A la tombée de la nuit, c’était l’heure pour le petit chien blanc de manger. Clémence était impatiente de le nourrir pour la première fois. Elle lui remplit une énorme gamelle de croquettes et une autre d’eau car il était très maigre. Mais le petit chien refusa de manger. Clémence s’inquiéta énormément mais Mathieu la rassura en lui disant qu’il avait sûrement  besoin d’un peu de temps pour s’adapter et qu’il allait finir par manger au cours de la nuit. Une fois rassurée elle alla se coucher avec son tendre fiancé.
    Le lendemain matin, Clémence se précipita dans la cuisine et, à sa grande surprise, le petit chien blanc était assis devant sa gamelle toujours pleine et était devenu carrément obèse. Un autre détail la frappa ; il avait en effet du sang séché tout autour de son museau. Sans réfléchir, elle alla spontanément vers lui comme si elle n’avait rien vu. Par contre, Mathieu lui, était stupéfait et essayait de raisonner Clémence sur le fait qu’il y avait un problème. Mais Clémence ne voulut rien entendre et continua tendrement de le cajoler.
    Cette fois, Mathieu n’allait pas travailler, il voulait absolument surveiller Clémence et ce petit chien blanc. Il expliqua donc à sa fiancée qu’il se sentait fiévreux et qu’il préférait se reposer. A dix heures, Clémence alla promener son nouveau chien qui n’avait toujours pas de nom. Elle et Mathieu n’arrivaient toujours pas à lui en trouver un, alors ils décidèrent de ne pas lui en donner. Avant de partir, elle fit bien comprendre à Mathieu qu’elle voulait se promener toute seule avec son chien. Mais lui n’avait pas confiance en ce chien et décida de les suivre le plus discrètement possible.
    Lors de la promenade, tout se passa très bien, quand Clémence vit de nouveau la vieille folle de la fourrière. Tout à coup, le petit chien se mit à grogner. Il avait senti la présence de Mathieu, alors ce dernier s’enfuit en courant et rentra chez lui afin d’éviter de se faire démasquer. Une fois rentré, il alluma sa radio : « Nous apprenons qu’un employé d’une société informatique a été retrouvé mort la veille au soir, égorgé devant son domicile. Les policiers ont également retrouvé une autre victime, qui serait morte ce matin, égorgée de la même façon que la première. Il s’agissait aussi d’un employé informatique mais qui travaillait dans une société différente. La police suspecte Clémence Berger car les deux victimes auraient été embauchées à sa place et elle aurait bénéficié des deux postes et de leur héritage en même temps, le même soir ». Ce fut un choc pour Mathieu, il s’agissait là de SA CLEMENCE et de SA FIANCEE ! DE SON GRAND AMOUR ! Si BELLE, si GENTILLE et si AFFECTUEUSE !
    Il lui fallait en avoir le cœur net. Il descendit si rapidement les escaliers qu’il trébucha. En se relevant, il vit Clémence et ce petit chien. Il n’arrivait pas à la regarder normalement, il doutait d’elle et elle l’avait ressenti. Elle ne supportait pas ses regards méfiants alors elle lui dit d’aller chercher le courrier, c’était exactement ce qu’il voulait faire, et de remonter seulement après. Il ne répondit rien et reprit son chemin. Une fois devant la boîte aux lettres, il était tellement stressé qu’il tremblotait. Un voisin le surprit et lui demanda ce qui l’effrayait à ce point. Mathieu répondit qu’il avait reçu les résultats d’un entretien d’embauche. Le voisin était assez satisfait de cette réponse, repartit sans rien ajouter. Mathieu avait des frissons partout, il ouvrit la boîte  aux lettres et pris le courrier. Il y avait là trois lettres : une facture et DEUX REPONSES POUR LES ENTRETIENS D’EMBAUCHE ! C’était catastrophique, il n’arrivait pas à ouvrir les enveloppes. Au bout de dix bonnes minutes, il les ouvrit. Il découvrit que SA Clémence avait été acceptée dans deux postes différents dans le domaine de l’informatique. Il ne pouvait pas y croire, pour lui c’était forcément un coup monté de toute pièce. Il retourna chez lui et annonça sans raison à Clémence qu’ils devaient partir en vacances tout seuls sans le chien blanc. Clémence avec beaucoup d’hésitation accepta de partir, mais à Paris.
    Ils y restèrent deux longs jours de bonheur. Bizarrement, Clémence était redevenue « normale ». Elle acceptait enfin d’écouter Mathieu, elle repensait à lui et non à ce petit chien blanc et aucun évènement étrange n’était survenu. Lorsqu’ils rentrèrent, le petit chien était vraiment très maigre ! Il n’avait plus que la peau sur les os et pourtant sa gamelle était pleine avec de la viande et des croquettes. En plus les lettres annonçant à Clémence qu’elle avait été acceptée dans deux postes avaient disparus. C’était comme si elles n’avaient JAMAIS existés. Les deux personnes assassinées étaient finalement vivantes. Et la police ne se souvenait de rien. Comme si rien de ces choses étranges ne s’étaient produites. Mathieu pensa qu’il était devenu complètement fou ! Il décida de ne rien dire à Clémence et de faire comme si de rien n’était.
    Le soir venu, Clémence ajouta de la sauce de poulet dans la gamelle du petit chien blanc, qu’elle n’avait pas vu depuis DEUX JOURS, en espérant qu’il allait manger ça et non des bestioles. En le voyant, elle ne put s’empêcher de le bichonner comme son propre enfant. Mathieu commençait à devenir jaloux de l’affection que portait Clémence à ce chien. Il essaya en vain de retenir Clémence de trop le bichonner. Au bout d’une heure interminable, il réussit à convaincre Clémence d’aller se coucher.
    Le lendemain matin, lorsque Mathieu se réveilla, Clémence n’était plus là. Inquiet, il se leva précipitamment en direction de la cuisine. Et alors, il fut stupéfait de ce qu’il vit : le petit chien blanc était énorme, il ne pouvait plus marcher, il roulait sur lui-même comme un gros ballon. On ne pouvait plus voir ses pattes tellement son ventre prenait de place. Et le pire, c’était que Clémence le caressait normalement comme s’il n’avait pas changé.
    Clémence et Mathieu étaient de plus en plus pauvres, Mathieu gagnait de moins en moins d’argent à cause de la crise économique. Les huissiers étaient déjà passés une fois. Mathieu entendit à la radio que les meurtres avaient recommencé ou plutôt commencé car personne ne se souvenait des deux premiers. Clémence, de son côté, héritait des biens de chaque victime sans comprendre pourquoi. Elle ne s’en plaignait pas, au contraire elle acceptait tout. Les policiers ne la suspectait plus du tout ou plutôt pas du tout, ils pensaient plus à plusieurs attaques de loups enragés. A ce moment-là, Mathieu comprit que le lien entre tous ces meurtres et la richesse soudaine de sa fiancée était le petit chien blanc qui paraissait pourtant si innocent.
    Il décida de démissionner afin de pouvoir rester plus longtemps auprès de Clémence. C’était tellement facile, il lui suffisait d’une lettre pour pouvoir rentrer chez lui. Et avec la fortune de sa fiancée, il ne craignait plus les huissiers. Il avait déduit de ces vacances que pour rester riche, il lui fallait continuer de cajoler le petit chien blanc. Clémence, de son côté, était devenu une sorte de « zombie » qui ne pensait plus qu’à ce chien. Elle en était folle et ne se rendait pas compte qu’elle se faisait manipuler. La seule personne raisonnable restait Mathieu qui n’avait pourtant aucun scrupule à garder le chien qui tuait plusieurs personnes. Il convainquit Clémence de s’installer dans une nouvelle maison, une villa peut être ou pourquoi pas s’acheter plusieurs bâtiments. Ils optèrent pour la villa.
    Mathieu n’avait plus aucune nouvelle de ses anciens collègues et personne ne s’étonnait de sa fortune subite, même les policiers avaient presque abandonné l’affaire des meurtres. Peu à peu, Clémence prit ses distances avec Mathieu pour se rapprocher du petit chien blanc. Il ne comprenait pas pourquoi et était devenu très jaloux de ce chien qu’il avait accepté d’héberger. Il se faisait de plus en plus chassé de sa propre villa. Il devenait alcoolique et trainait dans les bars en attendant que Clémence se calme. Par contre pour elle tout allait très bien : elle était de plus en plus riche, Mathieu la laissait souvent seule avec son chien qui le remplaçait. Pour elle, le petit chien blanc était devenu son nouvel amour. Il était parfait, il ne râlait pas, il la comprenait et de toute façon elle ne pouvait pas s’empêcher de le « vénérer ».
    Un matin, Mathieu était rentré ivre mort. Pour Clémence c’était parfait, elle avait enfin une raison pour se séparer de lui à tout jamais. Elle le mit à la porte en le jetant comme une vieille chaussette. En se relevant, Mathieu avait l’étrange impression que le petit chien blanc souriait ou plutôt ricanait comme un démon victorieux. Il se retint de l’étrangler, alors que pour lui, il était la cause de son malheur. Puis il décida de partir et de retourner dans son ancien appartement. Clémence pensait qu’elle était la femme la plus heureuse du monde. Mais elle ne se rendait pas compte que c’était tout le contraire.
    Comme tous les jours, elle alla promener son chien à dix heures. Elle habitait à au moins cinq kilomètres de son ancien appartement, pourtant elle croisa de nouveau la vieille dame, la folle qui avait toujours son air sournois. Clémence n’y fit pas attention et continua tranquillement sa promenade.
    Mathieu voulait à tout prix se débarrasser du petit chien. Il lui fallait retrouver sa Clémence et l’à débarrasser du démon qu’elle abritait. Il avait imaginé un plan qui lui semblait parfait. Tout d’abord, il lui fallait faire diversion afin de séparer Clémence et ce chien diabolique. Il lui téléphona en lui disant qu’elle avait oublié quelques bijoux dans son ancien appartement. Clémence, qui était très coquette, tomba dans son piège et partit sans son chien pour éviter tout problème avec Mathieu. Une fois Clémence parti, Mathieu, qui se cachait derrière un arbre, sortit et se dépêcha d’entrer dans la villa. Au moment où il ouvrit la porte, le petit chien se jeta sur lui. Il essaya de le mordre comme l’une de ses victimes. Par un réflexe, Mathieu réussit à attraper ce chien et à l’éjecter contre le mur, ce  qui  l’assomma.
    Il décida de l’enfermer dans une armoire en bois qu’il ferma à double tour. Puis il arrosa l’armoire et toute la maison d’huile. Il lui fallait se dépêcher car Clémence n’allait pas tarder à rentrer. Une fois sortit, il mit le feu à la maison. Le feu se répandit très vite et il ne restait presque plus rien de la villa. A ce moment, Clémence arriva et vit sa villa enflammée. Elle se mit à appeler son chien mais il ne répondit pas. Lorsqu’elle vit Mathieu, elle devint folle de rage. Elle courut vers lui dans le but de le frapper quand elle entendit le rire sournois de la vieille dame. Son visage apparaissait parmi les flammes et elle ricanait.
    Désorientés, Clémence et Mathieu étaient tétanisés devant l’incendie. Mathieu n’avait jamais vu cette vieille dame et ne comprenait pas ce que son visage faisait dans les flammes. Clémence, par contre, la connaissait et commençait à y voir plus clair. Son amour pour Mathieu réapparaissait comme si la brume se levait dans sa tête. Pour Mathieu, l’opération était un succès maintenant que sa Clémence était revenue. Mais il ne savait pas ce qui les attendait. Lorsqu’ils se retournèrent, ils virent la police qui les arrêta sur le champ.
    Mathieu et Clémence furent enfermés dans un hôpital psychiatrique. Par chance, ils étaient dans la même cellule. Clémence était redevenue « normale » et s’excusait presque tous les jours. Un matin, l’infirmière leur annonça une visite. Ils se levèrent et virent la vieille dame entrer. Elle les interpela : « Etes-vous au courant, savez-vous que les meurtres continus ? ». Mathieu répondit : « Ça n’est pas possible, j’ai tué le chien, j’ai tué le démon ! Et puis, vous devriez le savoir, vous étiez là. ». La vieille dame avait de nouveau son air sournois, elle ricanait et leurs dit : « Mais vous n’avez toujours pas compris, surtout vous Clémence, j’ai trouvé un nouveau disciple et à votre avis qui est le vrai démon ? ».

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